Œuvre
Ari Bayuaji
The Rangda
2022
- Catégorie :
- Sculpture
- Date de production :
- 2022
- Matériaux :
- Fils de plastique, masque, textiles, cuir, miroir, cuivre, verre, bois et acier
- Dimensions :
- 205 x 89 x 98 cm (dimensions approximatives)
- Description :
The Rangda est une sculpture réalisée principalement à partir de fils obtenus de câbles en plastique récupérés dans les forêts de mangroves et sur les plages d’Indonésie. Cette œuvre s’inscrit dans le projet d’art communautaire Weaving the Ocean (Tisser l’océan), entamé à Bali par Ari Bayuaji durant la période de confinement due à la pandémie de COVID-19.
La figure est celle de Rangda, héroïne du Calon Arang, un récit de cour balinais du 16e se déroulant à Java au 11e siècle. Les deux termes désignent le même personnage, « Calon Arang » signifiant l’apprentie sorcière et « rangda », la veuve. Les transformations apportées par l’artiste l’éloignent de sa représentation traditionnelle en intégrant des éléments tels que le plastique ou en abordant le thème de l’océan et de l’écologie. L’artiste établit un parallèle entre différentes vagues de destruction : les sortilèges de la déesse, la pandémie et la dévastation de l’environnement marin. Rangda n’étant pas initialement associée à une créature marine, l’évocation de l’écologie maritime constitue probablement l’écart le plus significatif par rapport au récit originel. Sa chevelure, habituellement garnie de fleurs de frangipanier souvent présentes dans les lieux de crémation à Bali, est ici parée de coraux en plastique, comme si elle surgissait de l’océan, domaine du sous-monde dans les traditions balinaises, source de peur et de forces maléfiques, la rendant encore plus effrayante. Le masque reprend les signes classiques de sa colère destructrice : des yeux exorbités, de longues dents avides de chair et une grande langue embrasée de flammes, lesquelles jaillissent également de tous les orifices de sa tête pour brûler ses ennemis. Plus récemment, une lecture féministe s’est développée, critiquant l’opposition entre la figure héroïque masculine et la féminité diabolique propres aux versions du récit, offrant une nouvelle manière d’appréhender le personnage de Rangda. Bien que l’association la plus évidente dans l’œuvre de Bayuaji soit celle entre la pandémie à Bali et l’épidémie dévastatrice déclenchée par Rangda, c’est dans cette lecture féministe que se positionne la sculpture.
La violence et la nature punitive du personnage contrastent avec l’histoire d’une œuvre, qui, dans sa conception initiale, décrit une communauté solidaire face aux défis économiques et écologiques, trouvant des solutions créatives pour survivre. Bayuaji nous présente néanmoins une figure de destruction « apprivoisée » occupant davantage une fonction d’avertissement. Sa Rangda symbolise le caractère nocif et destructeur de la pollution et la manière dont la nature, perturbée par les activités humaines, se venge à travers des épidémies et autres fléaux. Les boules de feu sur sa langue, ornées de miroirs, nous invitent à nous regarder et à saisir notre implication dans les maux du monde. Plus tragiquement, cette prise de conscience survient trop tard, au moment où nous sommes engloutis par les flammes et dévorés par Rangda. L’œuvre marque ainsi un seuil inévitable et sans issue.
- Mention de provenance :
- Achat, grâce au Symposium des collectionneurs 2023, Banque Nationale Gestion privée 1859
- Collection :
- Collection Musée d’art contemporain de Montréal
Art contemporain québécois - Date d’acquisition :
- 2023
- Numéro :
- A 23 8 S 11